« Les émotions jouent un rôle majeur pour transformer les habitudes de consommation »

Les problèmes environnementaux s’imposent comme l’une des préoccupations majeures des Français. Pourtant, des intentions aux actes, la marge de progrès est considérable. Fin 2022, les Français plaçaient, par exemple, la réduction des déchets au premier rang des actions publiques souhaitables sur le plan écologique, et 89 % d’entre eux affirmaient y veiller à titre individuel, selon la deuxième édition du baromètre « Les Français et leur empreinte carbone » réalisée par Odoxa pour EBRA-SUEZ.
Sans que, pour autant, la France réussisse à rattraper son retard sur ce plan par rapport aux autres pays européens. Comment s’y prendre ? Quel type d’action publique pourrait faire évoluer vraiment les comportements ? Plutôt que de parler seulement de règles ou de taxes, comme on le fait d’ordinaire lorsqu’on évoque la transition écologique, il est nécessaire de parler aussi d’émotions, car celles-ci jouent un rôle majeur pour transformer les habitudes.
Viser la sobriété, en particulier, n’a rien de facile. Une telle démarche oblige les individus à renoncer à une partie des plaisirs qu’offre la société de consommation. Souvent, aussi, les tentatives de sobriété volontaire suscitent des railleries de la part des proches. Pas simple de persévérer dans l’effort lorsqu’on est entouré de gens qui « profitent de la vie » et mettent à distance ceux qui pourraient leur donner mauvaise conscience.
Résister à la tentation d’un retour aux habitudes
Le rôle des pionniers les plus engagés dans la transition écologique est pourtant crucial. Leur exemple suscite d’autres vocations, des prises de conscience. L’évolution de la demande des consommateurs qui en résulte amène ensuite les entreprises à modifier leur offre. Ce changement progressif des mentalités est aussi nécessaire pour qu’un durcissement des règles environnementales devienne acceptable.
Mais comment soutenir les efforts de cette avant-garde désireuse de vivre et de consommer autrement ? Comment casser leur ambivalence entre, d’un côté, convictions et valeurs, et, de l’autre, attachement aux habitudes et souci d’appartenir au groupe majoritaire ? La recherche met en évidence le rôle très positif des « défis », tel le Défi vers le Zéro Déchet, lancé en 2016 à Roubaix (Nord), et qui a fait depuis de nombreux émules dans plusieurs régions (« Playing with trash : How gamification contributed to the bottom-up institutionalization of zero waste », Olivier Cristofini et Thomas Roulet, Academy of Management Proceedings, 2020).
S’engager dans un jeu collectif, quel qu’il soit, procure d’abord du plaisir aux participants, y compris lorsque l’objectif est d’avoir des poubelles aussi vides que possible ! Un plaisir crucial pour continuer d’agir face à l’adversité. Les retours réguliers sur les « performances » incitent aussi les participants à s’appliquer pour améliorer leur score, un peu comme dans un jeu vidéo. Le suivi dispensé par l’organisateur, ses encouragements permettent de conserver la motivation, de résister à la tentation d’un retour aux habitudes.
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